Les Cubains dans la Salsa Entre
la fin des années cinquante et le milieu des années soixante, de
nombreux musiciens cubains mais aussi d'autres régions de la Caraïbe
s'installent aux Etats-Unis, grossissant ainsi un panorama déjà
riche en musiciens et en formations prestigieux tels MACHITO, La LUPE, Arsenio
RODRÍGUEZ , José
CURBELO, "Pupi" Campo, "Tito" Rodríguez, "Tito" Puente, Noro Morales... |
A New York, les conjuntos,
charangas, jazz
bands
prolifèrent. Mais le nouveau milieu pousse à l'évolution. Les directeurs de ces groupes introduisent des transformations qui vont modifier les sonorités traditionnelles. Déjà lorsque au Palladium MACHITO interprétait les mambos, il offrait une sonorité différente de celle de PERÉZ PRADO. Les "AFROCUBANS" s'appuyaient sur les trompettes et saxophones, Dámaso PERÉZ PRADO sur les trombones. Ces apports vont se poursuivr e et se développer. Le Rock naissant, l'arrivée des instruments électriques vont avoir leurs conséquences immédiates. |
La batterie devient d'usage courant dans les
formations latines aux côtés des percussions traditionnelles. Les charangas commencent à électrifier leurs instruments, violons,
flûtes
et les guitares, basses et piano passent eux aussi à
l'électricité. Sous l'impulsion de Willie Colón les trombones vont revenir en force et la grande richesse dans les timbres produite par ces innovations donne un éclat nouveau aux rythmes caribéens joués par ces orchestres. | Willie Colón: Photographie, Paco Manzano. |
Parmi les musiciens récemment arrivés dans le Barrio, dans le South Bronx ou à Brooklyn -les nouveaux quartiers envahis par les caribéens-, le percussionniste et flûtiste dominicain Johnny Pacheco et sa Charanga parviennent à faire passer sur une radio un enregistrement que personne ne veut éditer. Le son est nouveau et "Oyeme Mulata" conquiert immédiatement les auditeurs. Pacheco est invité par le label Alegre à faire le disque tant attendu. |
Le public immigré de New York, Miami, Los Angeles...
s'identifie immédiatement à la nouvelle formule de Pacheco et à celle d'autres formations qui marchent depuis quelques années
sur un chemin identique ou voisin comme Joe Cuba et son sextet
La qualité musicale n'est pas toujours exceptionnelle mais l'heure n'est
pas aux préoccupations esthétiques. Le message de révolte
est primordial. Les textes, notamment ceux qu'interprète Héctor
Lavoe sont rebelles, provocateurs, liés à des problèmes
de société, de marginalisation de groupes sociaux et le succès
de ces ensembles commence à déborder du seul cadre latino pour toucher toute la communauté immigrée ainsi que les couches
les plus populaires. Il y a une exploitation commerciale à faire fructifier. |
En 1964 Johnny Pacheco s'associe
à un homme d'affaire américain, Joe Masucci pour créer un
nouveau label discographique, La Fania, afin d'enregistrer et promouvoir
cette nouvelle composante de la musique latine qui, une dizaine d'années
plus tard, va envahir le marché. Il faudra attendre plusieurs années avant que le qualificatif de Salsa soit attribué à cette nouvelle façon d'interpréter la musique. Il s'agit bien en effet d'une nouvelle façon de jouer et non d'un nouveau genre.
|
L'inspiration première de tous les artisans de la Salsa qu'ils
soient Portoricains, Dominicains, Panaméens, Cubains ou Nord-américains
reste la musique cubaine à laquelle, d'une façon ou d'une autre,
ils se sont abreuvés. |
Une
nouvelle fois, profitant également de la fermeture des relations entre
Cuba et les Etats Unis qui ne permet plus l'alimentation du Barrio en nouveautés
insulaires, le Son ou plus exactement des genres dérivés
du Son, la Pachanga, le Boogaloo -plus diffusés
dans le Barrio qu'à Cuba- vont s'ouvrir vers l'espace musical de
la Caraïbe.
Sous l'impulsion des Portoricains Rafael Cortijo, Ismael
Rivera, "Mon" Rivera, la Bomba et la
Plena, deux rythmes afro-portoricains historiquement proches des musiques
afro-cubaines sont également utilisés et servent de support à
la nouvelle façon de jouer. |
Cette ouverture vers l'extérieur autorise aussi des libertés avec la structure de la musique cubaine même lorsque celle-ci reste l'inspiration première. Reprenant et développant des changements que Arsenio RODRÍGUEZ ou Benny MORÉ avaient eux-mêmes amorcés, les Salseros rompent le schéma classique question-réponse caractéristique du Son mais aussi de la Bomba portoricaine. La Salsa en ce domaine se permet toutes les fantaisies. Elle joue même avec la structure des formations. Le conjunto, la charanga, le jazz band , le combo se fondent en un tout que les circonstances économiques déterminent le plus souvent. A son tour cette façon de travailler influe sur le type de musique produit. Après la Révolution, les Cubains affluent
sur le territoire des Etats Unis. |
Mais pendant ces dix premières années d'existence de la Salsa, les musiciens Cubains installés à New York ne sont
en fait que des interprètes embauchés pour leurs connaissances musicales
et instrumentales. Aucun n'est réellement un élément moteur du mouvement salsero. Le succès gigantesque rencontré par ce mouvement débouche rapidement sur un grave problème. La demande dépasse une offre en passe de décliner quantitativement et qualitativement. Au milieu de la décennie les compagnies commerciales, La Faniaen particulier, fait appel aux chanteurs, musiciens et groupes cubains installés
sur le territoire américain et offre au répertoire traditionnel
cubain, en particulier au Son, la possibilité de retrouver
les chemins menant vers un large public. La " SONORA MATANCERA
" possède déjà une grande renommée et un son
qui est proche de ce que diffuse La Fania. Elle sert de modèle à
une nouvelle Salsa qui double la Salsa pure, dure, rebelle, des
Colón et Lavoe. |
Deux noms cubains vont briller dans le nouveau monde
Salsero. Celia CRUZ et MACHITO. |
L'inévitable MACHITO, abandonné par Mario BAUZÁ et sa vocaliste Graciela, dissout les "AFROCUBANS", quitte le monde du Jazz et met sur pied avec son fils Mario, timbalero, sa fille Paula et de nouveaux musiciens, un orchestre totalement axé sur la Salsa: "MACHITO and His SALSA BIG BAND". Machito & his Sasla Big Band. L'orchestre comprend dans ses rangs le trompettiste cubain Alfredo "Chocolate" ARMENTEROS, installé aux Etats Unis. Le successeur de CHAPOTTÍN va se révéler dans une nouvelle facette accompagnant MACHITO jusqu'à l'obtention du Grammy de 1983 avec des titres issus des classiques de la musique populaire de l'île, " Quimbombo ", "El Manisero", "Yerbero" ... |
©
Patrick Dalmace
Des
années soixante aux années soixante-dix |
>>>> |